Catéchisme de Genève (Jean Calvin) part 3

Catéchisme de Genève par Jean Calvin:  Part 1 - Part 2 - Part 3

241 Le ministre : Comment le prouveras-tu?

L'enfant: Puisque Dieu est Esprit, il demande toujours le coeur, et singulièrement en oraison, où il est question de communiquer avec lui. Pourtant, il ne promet d'être prochain, sinon à ceux qui l'invoqueront en vérité (Psaumes 145:18) ; au contraire, il maudit tous ceux qui le font par hypocrisie et sans affection (Ésaïe 29:13-14).

242 Le ministre : Toutes prières donc faites seulement de bouche sont superflues?

L'enfant: Non seulement superflues, mais aussi déplaisantes à Dieu.

243 Le ministre : Quelle affection doit être en la prière?

L'enfant: Premièrement, que nous sentions notre misère et pauvreté, et que ce
sentiment cause en nous une fâcherie et angoisse ; puis, que nous ayons un désir
véhément d'obtenir grâce devant Dieu, lequel désir enflambe nos coeurs et engendre en nous une ardeur de prier.

244 Le ministre : Cela procède-t-il de notre nature, ou de la grâce de Dieu?

L'enfant: Il faut que Dieu y besogne. Car nous sommes trop stupides, mais l'Esprit de Dieu nous incite à gémissements inénarrables et forme en nos coeurs telle affection et tel zèle que Dieu demande, comme dit saint Paul (Romains 8:26 ; Galates 4:6).

245 Le ministre : Est-ce à dire que nous ne devions pas nous inciter et solliciter à prier Dieu?

L'enfant: Non. Mais au contraire, afin que quand nous ne sentons pas en nous telle disposition, que nous suppliions le Seigneur qu'il y mette pour nous rendre capables et idoines à le prier dûment.

246 Le ministre : Tu n'entends pas toutefois que la langue soit du tout inutile en prières?

L'enfant: Non pas. Car quelquefois elle aide l'esprit et le retient, le fortifiant à ce qu'il ne se détourne pas si tôt de Dieu. Davantage, puisqu'elle est formée pour glorifier Dieu, pardessus tous les autres membres, c'est bien raison qu'elle s'y emploie en toutes sortes, et aussi le zèle du coeur, par son ardeur et véhémence, contraint souvent la langue à parler sans qu'on y pense.

247 Le ministre : Si ainsi est, qu'est-ce de prier en langue inconnue?

L'enfant: C'est une moquerie de Dieu, et une hypocrisie perverse (1 Corinthiens 14).

Le 36e dimanche

Il faut prier avec certaine confiance

248 Le ministre : Quand nous prions Dieu, est-ce à l'aventure, ne sachant point si nous profiterons, ou non? Ou bien, si nous devons être certains que nos prières seront
exaucées?

L'enfant: Il nous faut toujours avoir ce fondement en nos prières qu'elles seront reçues
de Dieu et que nous obtiendrons ce que nous requérons, en tant qu'il sera
expédient. Et pourtant, dit saint Paul, que la droite invocation procède de la foi
(Romains 10:14). Car si nous n'avons fiance en la bonté de Dieu, il nous est impossible de l'invoquer en vérité.

249 Le ministre : Et que sera-ce de ceux qui doutent et ne savent si Dieu les écoute ou non?

L'enfant: Leurs prières sont du tout frivoles, d'autant qu'elles n'ont nulle promesse. Car il est dit que nous demandions en croyant et qu'il nous sera octroyé (Matthieu 21:22 ; Marc 11:24).

250 Le ministre : Il reste de savoir comment et à quel titre nous pouvons avoir la hardiesse de nous présenter devant Dieu, vu que nous en sommes par trop indignes.

L'enfant: Premièrement, nous avons les promesses auxquelles il nous faut arrêter, sans
considérer notre dignité (Psaumes 50:15 ; 91:3 ; 145:18 ; Ésaïe 30:15 ; 65:24 ;
Jérémie 29:12 ; Joël 3:5) (36). Secondement, si nous sommes enfants de Dieu, il
nous induit et pousse par son Saint-Esprit à nous retirer familièrement à lui,
comme à notre Père (Matthieu 9:2, 22 et alibi). Et afin que nous ne craignions
pas de comparaître devant sa Majesté glorieuse, nous qui ne sommes que
pauvres vers de terre et misérables pécheurs, il nous donne notre Seigneur Jésus
pour Médiateur (1 Timothée 2:5 ; Hébreux 4:16 ; 1 Jean 2:1), afin que par son
moyen ayant accès, nous ne doutions point de trouver grâce.

Il ne faut prier qu'au Nom de Christ

251 Le ministre : Entends-tu qu'il ne nous faille invoquer Dieu qu'au Nom de Jésus-Christ?

L'enfant: Je l'entends ainsi. Car nous en avons le commandement exprès. Et en ce faisant nous est promis que par la vertu de son intercession nos requêtes nous seront octroyées (Jean 14:13).

252 Le ministre : Ce n'est point donc témérité, ni folle présomption, de nous oser adresser privément à Dieu, moyennant que nous ayons Jésus-Christ pour notre avocat, et que nous le mettions en avant, afin que Dieu, par son moyen, nous ait agréables et nous exauce?

L'enfant: Non. Car nous prions comme par sa bouche, d'autant qu'il nous donne entrée et audience et intercède pour nous (Romains 8:34).

Le 37e dimanche

253 Le ministre : Parlons maintenant de la substance de nos oraisons. Pouvons-nous demander tout ce qui nous vient en l'entendement, ou s'il y a quelque certaine règle là-dessus?

L'enfant: Si nous suivions notre fantaisie, nos oraisons seraient bien mal réglées. Car nous sommes si ignorants que nous ne pouvons pas juger ce qui est bon de demander, aussi nos désirs sont si désordonnés qu'il est bon métier que ne leur lâchions point la bride.

255 Le ministre : Que faut-il donc?

L'enfant: Que Dieu même nous enseigne, selon qu'il connaît être expédient, et quasi qu'il nous conduise par la main, et que nous ne fassions que suivre.

255 Le ministre : Quelle instruction nous en a-t-il baillée?

L'enfant: Par toute l'Ecriture il nous l'a baillée très ample. Mais, afin de nous mieux adresser à un certain but, il a donné un formulaire auquel il a brièvement compris tous les points qu'il nous est licite et expédient de demander.

L'oraison chrétienne que nous a apprise notre Seigneur

256 Le ministre : Récite-le.

L'enfant: C'est que notre Seigneur Jésus, étant requis de ses disciples qu'il les
enseignât de prier, leur répond qu'ils auront à dire ainsi (Matthieu 6:9-13 ; Luc
11:1-4) :
Notre Père, qui es aux cieux ;
ton Nom soit sanctifié ;
ton Règne advienne ;
ta volonté soit faite en la terre comme au ciel ;
donne-nous aujourd'hui notre pain quotidien ;
pardonne-nous nos offenses, comme nous pardonnons à ceux
qui nous ont offensés ;
et ne nous induis point en tentation, mais nous délivre du mal.
Car à toi est le Règne, la gloire et la puissance, aux siècles des
siècles. Amen.

La division de l'oraison dominicale

257 Le ministre : Pour plus facile intelligence, dis-moi combien d'articles elle contient.

L'enfant: Six, dont les trois premiers regardent la gloire de Dieu, sans quelque considération de nous-mêmes, les autres sont pour nous et concernent notre bien et profit.

258 Le ministre : Comment donc? Faut-il demander quelque chose à Dieu dont il ne nous revienne nulle utilité?

L'enfant: Il est vrai que par sa bonté infinie, il dispose et ordonne tellement toutes choses que rien ne peut être à la gloire de son Nom, qui ne nous soit même salutaire. Ainsi, quand son Nom est sanctifié, il nous tourne cela en sanctification ; quand son Règne advient, nous en sommes aucunement participants. Mais en désirant et demandant ces choses, ilnous faut avoir seulement égard à son honneur, sans penser à nous aucunement, ni chercher notre profit.

259 Le ministre : Selon ton dire, ces trois premières requêtes nous sont bien utiles, mais il ne les faut faire à autre intention, sinon pour désirer que Dieu soit glorifié.

L'enfant: Voire. Et semblablement, jà soit que les trois dernières soient députées à désirer ce qui nous est expédient, toutefois la gloire de Dieu nous doit être en icelles recommandées, tellement que ce soit la fin de tous nos désirs.

Le 38e dimanche

Qu'emporte le mot de « Père » en Dieu

260 Le ministre : Venons à l'exposition. Et devant qu'entrer plus avant, pourquoi est ici Dieu appelé « notre Père », plutôt qu'autrement?

L'enfant: D'autant qu'il est bien requis que nos consciences soient fermement assurées, quand il est question de prier, notre Dieu se nomme d'un mot qui n'emporte que douceur et gracieuseté, pour nous ôter tout doute et perplexité et nous donner hardiesse de venir privément à soi.

261 Le ministre : Oserons-nous bien donc nous retirer familièrement à Dieu, comme un enfant à son père?

L'enfant: Oui, voire avec plus grande certitude d'obtenir ce que nous demanderons. Car si nous qui sommes mauvais ne pouvons refuser à nos enfants le pain et la viande quand ils nous demandent, tant moins le fera notre Père céleste qui non seulement est bon, mais est la souveraine bonté (Matthieu 7:11).

262 Le ministre : De ce Nom même ne pouvons-nous pas bien prouver ce qui a été dit, que la prière doit être fondée en l'intercession de Jésus-Christ?

L'enfant: Oui pour certain, d'autant que Dieu ne nous avoue pour ses enfants, sinon en tant que nous sommes membres de son Fils.

Notre

263 Le ministre : Pourquoi n'appelles-tu pas Dieu « ton Père », mais l'appelles « notre », en commun?

L'enfant: Chacun fidèle le peut bien nommer sien en particulier, mais en ce formulaire Jésus-Christ nous enseigne de prier en commun, pour nous admonester que nous devons exercer notre charité envers nos prochains en priant, et non pas seulement avoir le soin de nous.

264 Le ministre : Que veut dire cette particule « qui es aux cieux »?

L'enfant: C'est autant, comme si je l'appelais haut, puissant, incompréhensible.

265 Le ministre : Comment cela? Et pour quelle fin?

L'enfant: Afin qu'en l'invoquant, nous apprenions d'élever en haut nos pensées pour ne rien imaginer de lui charnel, ni terrien et ne le mesurer à notre appréhension, ni l'assujettir à notre volonté, mais adorer en humilité sa Majesté glorieuse, et aussi pour avoir plus certaine fiance en lui, en tant qu'il est Gouverneur et
Maître de tout.

Le 39e dimanche

Première requête : comment le Nom de Dieu est sanctifié

266 Le ministre : Expose maintenant la première demande.

L'enfant: Le Nom de Dieu est sa renommée, de laquelle il est célébré entre les
hommes. Nous désirons donc que sa gloire soit exaltée par tout et en toutes choses.

267 Le ministre : Entends-tu qu'elle puisse croître ou diminuer?

L'enfant: Non pas en soi-même. Mais c'est-à-dire qu'elle soit manifestée comme elle doit, et quelque chose que Dieu fasse, que toutes ses Oeuvres apparaissent glorieuses comme elles sont, tellement qu'en toutes sortes il soit glorifié.

La deuxième requête : où gît le Règne de Dieu

268 Le ministre : En la seconde requête, qu'entends-tu par « le Règne de Dieu »?

L'enfant: Il consiste principalement en deux points. C'est de conduire les siens et
gouverner par son Esprit ; au contraire, d'abîmer et confondre les réprouvés, qui
ne se veulent rendre sujets à sa domination, afin que clairement il apparaisse
qu'il n'y a nulle puissance qui puisse résister à la sienne.

Règne de Christ

269 Le ministre : Comment pries-tu que ce Règne advienne?

L'enfant: C'est que de jour en jour le Seigneur multiplie le nombre de ses fidèles, qu'il augmente de jour en jour ses grâces sur eux jusqu'à ce qu'il les ait du tout remplis, qu'il éclaircisse aussi de plus en plus sa vérité, qu'il manifeste sa justice, dont Satan et les ténèbres de son règne soient confondus, et que toute iniquité soit détruite et abolie.

Perfection du Règne de Christ

270 Le ministre : Cela ne se fait-il pas dès à présent?

L'enfant: Si fait bien, en partie. Mais nous désirons que continuellement il croisse et
soit avancé jusqu'à ce qu'il vienne finalement à sa perfection, qui sera au jour du
jugement, auquel Dieu sera exalté seul, et toute créature sera humiliée sous sa
grandeur ; même il sera tout en toutes choses (1 Corinthiens 15:28).

Le 40e dimanche

La troisième requête : comment la volonté de Dieu doit êtreaccomplie

271 Le ministre : Comment requiers-tu que la volonté de Dieu soit faite?

L'enfant: Que toutes créatures lui soient sujettes pour lui rendre obéissance et ainsi
que tout se fasse selon son bon plaisir.

272 Le ministre : Entends-tu que rien se puisse faire contre sa volonté?

L'enfant: Nous requérons non pas seulement qu'il amène toutes choses à tel point que ce qu'il a déterminé en son conseil advienne, mais que toute rébellion abattue, il range toutes volontés à la sienne seule.

Renouvellement

273 Le ministre : En ce faisant, ne renonçons-nous pas à nos propres volontés?

L'enfant: Si faisons, et non seulement afin qu'il renverse nos désirs qui contreviennent à son bon plaisir, les rendant vains et de nul effet, mais aussi qu'il crée en nous nouveaux esprits et nouveaux coeurs, tellement que nous ne voulions rien de nous-mêmes, mais que son Esprit veuille en nous pour nous faire pleinement consentir avec lui.

Volonté de Dieu faite au ciel

274. Le Ministre : Pourquoi ajoutes-tu « en la terre comme au ciel »?

L'enfant: D'autant que ses créatures célestes, qui sont ses anges, ne cherchent qu'à lui obéir paisiblement, sans quelque contrariété, nous désirons que le semblable se fasse en terre, c'est que tous hommes se rangent en obéissance volontaire.

Le 41e dimanche

La quatrième requête : que c'est que demander notre pain quotidien

275 Le ministre : Venons à la seconde partie. Qu'entends-tu par le pain quotidien que tu
demandes?

L'enfant: Généralement tout ce qui fait besoin à l'indigence de notre corps, non
seulement quant à la nourriture et vêture, mais tout ce que Dieu connaît nous être expédient à ce que puissions manger notre pain en paix.

Dieu bénit le labeur

276 Le ministre : Comment demandes-tu à Dieu qu'il te donne ta nourriture, vu qu'il nous commande de la gagner au travail de nos mains?

L'enfant: Combien qu'il nous faille travailler pour vivre, toutefois si est-ce que notre labeur, industrie et diligence ne nous nourrissent pas, mais la seule bénédiction de Dieu, laquelle est sur nos mains et notre labeur pour le faire prospérer. Et davantage, il nous faut entendre que ce ne sont pas les viandes qui nous nourrissent, encore que nous les ayons à commandement, mais la vertu du Seigneur qui use d'icelles comme d'instrument, tant seulement (Deutéronome 8:3, 17).

277 Le ministre : Pourquoi l'appelles-tu tien, puisque tu demandes qu'il te soit donné?

L'enfant: C'est par la bonté de Dieu qu'il est fait nôtre, encore qu'il ne nous soit point dû. Et aussi par cela nous sommes avertis de ne désirer le pain d'autrui, mais celui que nous aurons acquis par moyen légitime, selon l'ordonnance de Dieu.

Pain quotidien

278 Le ministre : Pourquoi dis-tu « quotidien » et « aujourd'hui »?

L'enfant: Cela est pour nous apprendre d'avoir contentement et ne point appéter plus que notre nécessité requiert.

279 Le ministre : Vu que cette prière est commune à tous, comment les riches, qui ont provision et abondance de biens pour longtemps, peuvent-ils demander pour un jour?

L'enfant: Il faut que tant riches que pauvres entendent que tout ce qu'ils ont ne leur peut de rien profiter, sinon en tant que le Seigneur leur en donne l'usage et fait par sa grâce qu'il nous soit profitable. Ainsi en ayant, nous n'avons rien, sinon d'autant qu'il le nous donne.

Le 42e dimanche

La cinquième demande

280 Le ministre : Que contient la cinquième demande?

L'enfant: Qu'il plaise à Dieu nous pardonner nos péchés. Il n'y a si saint qui n'ait métier que Dieu lui pardonne

281 Le ministre : N'y a-t-il homme vivant si juste qui n'ait métier de le faire?

L'enfant: Non. Car le Seigneur Jésus a donné cette forme à ses apôtres pour son
Église. Ainsi, quiconque s'en voudrait exempter renoncerait à la communauté
des chrétiens. Et de fait, l'Ecriture nous testifie que le plus parfait, voulant
alléguer un point à Dieu pour se justifier, sera trouvé coupable en mille (Job
9:2-3). Il faut donc que nous ayons tous notre refuge à sa miséricorde.

Quelle est la rémission des péchés

282 Le ministre : Comment entends-tu que cette rémission nous soit faite?

L'enfant: Comme les paroles même dont Jésus-Christ a usé le montrent, c'est que les péchés sont dettes, lesquelles nous tiennent obligés à condamnation de mort
éternelle. Nous demandons que Dieu nous en acquitte par sa pure libéralité.

283 Le ministre : Tu entends donc que nous obtenons rémission de nos péchés par la
bonté gratuite de Dieu?

L'enfant: Voire. Car nous ne pouvons nullement satisfaire pour la moindre faute que
nous ayons commise, si Dieu n'use envers nous de sa pure libéralité, en nous les
remettant toutes.

Fruit du pardon des péchés

284 Le ministre : Quand Dieu nous a pardonné nos péchés, quel fruit et utilité nous en revient?

L'enfant: Par ce moyen, nous lui sommes agréables, comme si nous étions justes et innocents, et nos consciences sont assurées de sa dilection paternelle envers
nous, d'où vient salut et vie.

Pardon des fautes est gratuit

285 Le ministre : Quand tu demandes qu'il nous pardonne comme nous pardonnons à ceux qui nous ont offensés, entends-tu qu'en pardonnant aux hommes, que nous méritions pardon de lui?

L'enfant: Non pas. Car le pardon ne serait plus gratuit, et ne serait pas fondé en la
satisfaction, qui a été en la mort de Jésus-Christ, comme il doit être. Mais en
tant qu'en oubliant les injures qu'on nous fait, nous ensuivons sa douceur et
clémence, et ainsi nous démontrons être ses enfants, il nous donne cette
enseigne pour nous certifier. Et d'autre part, il nous signifie qu'il ne nous faut
attendre en son jugement que toute sévérité et extrême rigueur, si nous ne
sommes faciles à pardonner et faire grâce à ceux qui sont coupables envers
nous.

Désavoués enfants de Dieu

286 Le ministre : Tu entends donc que Dieu désavoue ici pour ses enfants ceux qui ne
peuvent oublier les offenses qu'on leur fait, afin qu'ils ne s'attendent pas d'être
participants de cette grâce?

L'enfant: Voire. Et que tous sachent qu'à la même mesure qu'ils auront fait à leurs
prochains, il leur sera rendu.

Le 43e dimanche

La sixième requête

287 Le ministre : Qu'est-ce qui s'ensuit?

L'enfant: « Ne nous induis pas en tentation, mais délivre-nous du mal ».

288 Le ministre : Ne fais-tu qu'une requête de cela?

L'enfant: Non, car le second membre est exposition du premier.

289 Le ministre : Quel est la substance d'icelle?

L'enfant: Que Dieu ne nous laisse point trébucher au mal et ne permette que nous
soyons vaincus du diable et des mauvaises concupiscences de notre chair,
lesquelles bataillent contre nous (Romains 7:23), mais qu'il nous donne la force
de résister, nous soutenant de sa main et nous ayant en sa sauvegarde pour nous
défendre et conduire.

290 Le ministre : Comment cela se fait-il?

L'enfant: Quand par son Esprit il nous gouverne pour nous faire aimer le bien et haïr
le mal, suivre sa justice et fuir le péché. Car par la vertu du Saint-Esprit nous
surmontons le diable, le péché et la chair.

291 Le ministre : Cela est-il nécessaire à tous?

L'enfant: Oui. Car le diable veille toujours sur nous, comme un lion rugissant, prêt à
nous dévorer (1 Pierre 5:8), et nous sommes si faibles et fragiles qu'il nous
aurait incontinent abattus si Dieu ne nous fortifiait pour en avoir la victoire.

Tentation

292 Le ministre : Que signifie le mot de « tentation »?

L'enfant: Les astuces et tromperies du diable dont il use pour nous surprendre, selon que notre sens naturel est enclin à être déçu, et nous décevoir, et notre volonté
est plutôt prête de s'adonner au mal qu'au bien.

293 Le ministre : Mais pourquoi demandes-tu à Dieu qu'il ne t'induise point au mal, vu
que cela est le propre office du diable?

L'enfant: Comme Dieu, par sa miséricorde, conserve ses fidèles, et ne permet que le
diable les séduise, ni que le péché les surmonte, aussi ceux qu'il veut punir, non
seulement il les abandonne et retire sa grâce d'eux, mais aussi les livre au diable
pour être sujets à sa tyrannie, les aveugle et les met en sens réprouvé.

294 Le ministre : Que veut dire cette addition : « car à toi est le Règne, la gloire et la
puissance, aux siècles des siècles »?

L'enfant: Pour nous réduire derechef en mémoire que nos oraisons sont plutôt fondées
en Dieu et en sa puissance et bonté que non pas en nous, qui ne sommes pas
dignes d'ouvrir la bouche pour le requérir. Et aussi pour nous apprendre de clore
toutes nos prières par sa louange.

Le 44e dimanche

295 Le ministre : N'est-il licite de demander autre chose, sinon ce qui a été récité?

L'enfant: Combien qu'il nous soit libre d'user d'autres paroles et d'autre forme et
manière, si est-ce que nulle oraison ne sera jamais agréable à Dieu laquelle ne
se rapporte à celle-ci, comme à la règle unique de bien prier.

IV. DES SACREMENTS

La quatrième espèce de vrai honneur de Dieu

296 Le ministre : Il est temps de venir au quatrième membre de l'honneur que nous devons rendre à Dieu.

L'enfant: Nous avons dit que c'est de le reconnaître de coeur et confesser de bouche auteur de tous biens pour le glorifier.

297 Le ministre : Ne nous a-t-il pas baillé quelque règle pour ce faire?

L'enfant: Toutes les louanges et actions de grâces contenues en l'Ecriture nous doivent être pour règle et enseignement.

298 Le ministre : N'en a-t-il rien été touché en l'oraison?

L'enfant: Si a bien. Car en désirant que son Nom soit sanctifié, nous désirons que toutes ses oeuvres apparaissent glorieuses, comme elles le sont. Tellement que soit qu'il punisse, il soit tenu pour juste, soit qu'il pardonne, pour miséricordieux, soit qu'il accomplisse ses promesses, pour véritable. En somme, qu'il n'y ait du tout rien en quoi sa gloire ne reluise. Cela est lui attribuer la louange de tous biens.

299 Le ministre : Que conclurons-nous de tout ce qu'avons dit?

L'enfant: Ce que témoigne la vérité et qui a été touché au commencement, à savoir que cette est la vie éternelle, de connaître le vrai Dieu et celui qu'il a envoyé, Jésus-Christ (Jean 17:3), le connaître, dis-je, pour l'honorer dûment, afin qu'il nous soit non seulement Maître et Seigneur, mais aussi Père et Sauveur (Matthieu 1:21), et que nous mutuellement lui soyons enfants, serviteurs et peuple dédié à sa gloire.

Le 45e dimanche

Le salut nous est présenté par la Parole de Dieu

300. M : Quel est le moyen de parvenir à un tel bien?

L'enfant: Pour ce faire, il nous a laissé sa sainte Parole, laquelle nous est comme une entrée en son Royaume céleste.

301 Le ministre : Où prends-tu cette Parole?

L'enfant: Comme elle nous est comprise ès saintes Ecritures.

302 Le ministre : Comment faut-il que nous en usions pour en avoir le profit?

L'enfant: En la recevant en pleine certitude de conscience, comme vérité procédée du
ciel, nous soumettant à icelle en droite obéissance, l'aimant de vraie affection et
entière, l'ayant imprimée en nos coeurs pour la suivre et nous conformer à icelle.

303 Le ministre : Tout cela est-il en notre puissance?

L'enfant: Il n'y en a du tout rien. Mais c'est Dieu qui besogne en nous en telle sorte par son Saint-Esprit.

Il faut mettre peine d'apprendre

304 Le ministre : Mais ne faut-il pas que nous mettions peine et diligence à ouïr et lire la doctrine, laquelle nous y est montrée?

L'enfant: Oui bien. Et premièrement, que chacun en son particulier y travaille. Et
surtout, que nous fréquentions les prédications, auxquelles cette Parole est exposée en l'assemblée des chrétiens.

305 Le ministre : Entends-tu qu'il ne suffit pas de lire en sa maison, sinon que tous ensemble oyent une doctrine commune?

L'enfant: Je l'entends ainsi, cependant que Dieu en donne le moyen.

306 Le ministre : La raison?

L'enfant: Parce que Jésus-Christ a établi cet ordre en son Église (Éphésiens 4:11), non pas pour deux ni pour trois, mais pour tous généralement, et a déclaré que c'est le seul moyen de l'édifier et entretenir. Ainsi il nous faut là tous ranger, et n'être pas plus sages que notre Maître.

Des pasteurs ecclésiastiques

307 Le ministre : Est-ce donc chose nécessaire qu'il y ait des pasteurs?

L'enfant: Oui, et qu'on les écoute, recevant en humilité la doctrine du Seigneur par
leur bouche. Tellement que quiconque les méprise et refuse de les ouïr, il rejette Jésus-Christ et se sépare de la compagnie des fidèles (Matthieu 10:40 ; Luc 10:16).

308 Le ministre : Mais suffit-il d'avoir une fois été instruit par eux, ou s'il faut continuer?

L'enfant: Ce n'est rien de commencer si on ne poursuit et persévère toujours. Car
jusqu'à la fin, il nous convient d'être toujours écoliers de Jésus-Christ. Et il a ordonné les ministres ecclésiastiques pour nous enseigner en son nom.

Le 46e dimanche

Des sacrements

309 Le ministre : N'y a-t-il point d'autre moyen outre la Parole par lequel Dieu se communique à nous?

L'enfant: Il a conjoint les sacrements avec la prédication de sa Parole.

310 Le ministre : Qu'est-ce que sacrement?

L'enfant: C'est un témoignage extérieur de la grâce de Dieu, qui par signe visible nous représente les choses spirituelles, afin d'imprimer plus fort en nos coeurs les promesses de Dieu et nous en rendre plus certains.

311 Le ministre : Comment un signe visible et matériel a-t-il cette vertu de certifier la conscience?

L'enfant: Non pas de soi-même, mais en tant qu'il est ordonné de Dieu à cette fin.

312 Le ministre : Vu que c'est le propre office du Saint-Esprit de sceller les promesses de Dieu en nos coeurs, comment attribues-tu cela aux sacrements?

L'enfant: Il y a grande différence entre l'un et l'autre. Car l'Esprit de Dieu à la vérité est celui seul qui peut toucher et émouvoir nos coeurs, illuminer nos entendements et assurer nos consciences, tellement que tout cela doit être jugé son oeuvre propre pour lui en rendre louange. Cependant le Seigneur s'aide des sacrements, comme d'instruments inférieurs, selon que bon lui semble, sans que la vertu de son Esprit en soit aucunement amoindrie.

313 Le ministre : Tu entends donc que l'efficace des sacrements ne gît pas en l'élément extérieur, mais procède toute de l'Esprit de Dieu?

L'enfant: Voire, selon que Dieu veut besogner par les moyens qu'il a institués, sans déroger à sa puissance.

Les sacrements nous sont donnés pour notre infirmité

314 Le ministre : Et qui meut Dieu de faire cela?

L'enfant: Pour le soulagement de notre infirmité. Car si nous étions de nature spirituelle, comme les anges, nous pourrions contempler spirituellement et lui et ses grâces. Mais ainsi que nous sommes enveloppés de nos corps, nous avons métier qu'il use de figures envers nous pour nous représenter les choses spirituelles et célestes. Car autrement nous ne les pourrions comprendre. Et aussi il nous est expédient que tous nos sens soient exercés en ses saintes promesses pour nous confirmer en icelles.

Le 47e dimanche

Les sacrements sont nécessaires

315 Le ministre : Puisque Dieu a introduit les sacrements pour notre nécessité, ce serait orgueil et présomption de penser qu'on s'en peut passer.

L'enfant: Oui pour certain. Tellement que quiconque s'abstient volontairement de l'usage, pensant qu'il n'en a point de besoin, méprise Jésus-Christ, rejette sa grâce et éteint son Saint-Esprit.

316 Le ministre : Mais quelle certitude de grâce peuvent donner les sacrements vu que bons et mauvais les reçoivent?

L'enfant: Combien que les incrédules et méchants anéantissent la grâce qui leur est
présentée par les sacrements, si ne s'ensuit-il pas que la propriété d'iceux ne soit
telle.

L'effet des sacrements

317 Le ministre : Comment donc et quand est-ce que les sacrements produisent leur effet?

L'enfant: Quand on les reçoit en foi, cherchant seulement Jésus-Christ et sa grâce.

Chercher Jésus-Christ aux sacrements

318 Le ministre : Pourquoi dis-tu que nous y devons chercher Jésus-Christ?

L'enfant: Pour signifier qu'il ne nous faut pas amuser au signe terrien pour là chercher notre salut, et que ne nous faut pas imaginer qu'il y ait là quelque vertu enclose, mais au contraire que nous prenions le signe pour une aide qui nous conduise droitement au Seigneur Jésus, pour chercher en lui salut et tout bien.

Augmentation de foi par les sacrements

319 Le ministre : Vu que la foi y est requise, comment dis-tu qu'ils nous sont donnés pour nous confirmer en foi, nous assurant des promesses de Dieu?

L'enfant: Il ne suffit pas que la foi soit seulement commandée en nous pour une fois,
mais faut qu'elle soit nourrie et entretenue, puis qu'elle croisse journellement et
soit augmentée en nous. Pour la nourrir donc, pour la fortifier et l'accroître,
Dieu nous donne les sacrements. Ce que saint Paul dénote, en disant que l'usage
d'iceux est de sceller les promesses de Dieu en nos coeurs (Romains 4:11).

Imperfection des enfants de Dieu

320 Le ministre : Mais n'est-ce pas signe d'infidélité quand les promesses de Dieu ne nous sont pas assez fermes d'elles-mêmes, sans aide?

L'enfant: C'est signe de petitesse et infirmité de foi, laquelle est bien aux enfants de Dieu, qui ne laissent pas pourtant d'être fidèles, mais ce n'est pas encore en perfection. Car cependant que nous vivons en ce monde, il y a toujours quelques reliques de défiance en notre chair, et pourtant nous faut-il toujours profiter et croître.

Le 48e dimanche

Du nombre des sacrements

321 Le ministre : Combien y a-t-il de sacrements en l'Église chrétienne?

L'enfant: Il n'y en a que deux communs que le Seigneur Jésus ait institués pour toute la compagnie des fidèles.

Le baptême et la cène

322 Le ministre : Quels?

L'enfant: A savoir le baptême et la sainte cène.

Du baptême

323 Le ministre : Quelle convenance et différence y a-t-il de l'un à l'autre?

L'enfant: Le baptême nous est comme une entrée en l'Église de Dieu, car il nous atteste que Dieu, au lieu que nous étions étrangers de lui, nous reçoit pour ses domestiques. La cène nous est témoignage que Dieu nous veut nourrir et repaître, comme un bon père de famille a le soin de nourrir et réfectionner ceux de sa maison.

Signification du baptême

324 Le ministre : Pour avoir plus claire intelligence de l'un et l'autre, disons de chacun à part. Premièrement, quelle est la signification du baptême?

L'enfant: Elle a deux parties. Car le Seigneur nous y représente la rémission de nos
péchés (Éphésiens 5:26-27), et puis notre régénération, ou renouvellement spirituel (Romains 6:4).

Le 49e dimanche

L'eau du baptême

325 Le ministre : Quelle similitude a l'eau avec ces choses pour les représenter?

L'enfant: Parce que la rémission des péchés est une espèce de lavement par lequel nos âmes sont purgées de leurs macules, ainsi que les ordures du corps sont nettoyées par l'eau.

L'eau, pourquoi est mise sur la tête

326 Le ministre : Touchant l'autre partie?

L'enfant: Parce que le commencement de notre régénération est que notre nature soit mortifiée, l'issue [est] que nous soyons nouvelles créatures par l'Esprit de Dieu. L'eau donc nous est mise sur la tête en signe de mort, toutefois en telle sorte que la résurrection nous est semblablement figurée, en ce que cela se fait seulement pour une minute de temps et non pas pour nous noyer en l'eau.

Le sang de Christ est notre lavement, non l'eau

327 Le ministre : Tu n'entends pas que l'eau soit le lavement de nos âmes?

L'enfant: Non pas. Car cela appartient au sang de Jésus-Christ seulement, qui a été répandu pour effacer toutes nos souillures et nous rendre purs et impollus devant Dieu (1 Jean 1:7 ; 1 Pierre 1:19). Ce qui est accompli en nous quand nos consciences en sont arrosées par le Saint-Esprit. Mais par le sacrement cela nous est certifié.

Vérité jointe avec la figure

328 Le ministre : Entends-tu que l'eau nous en soit seulement une figure?

L'enfant: C'est tellement figure que la vérité est conjointe avec. Car Dieu ne nous promet rien en vain. Par quoi il est certain qu'au baptême la rémission des péchés nous est offerte, et nous la recevons.

329 Le ministre : Cette grâce est-elle accomplie indifféremment en tous?

L'enfant: Non. Car plusieurs l'anéantissent par leur perversité. Néanmoins, si ne laisse pas le sacrement d'avoir telle nature, combien qu'il n'y ait que les fidèles qui en sentent l'efficace.

Régénération, d'où prend sa vertu

330 Le ministre : La régénération, d'où prend-elle sa vertu?

L'enfant: De la mort et résurrection de Christ. Car sa mort a cette vertu que par icelle notre vieil Adam est crucifié et notre nature vicieuse est comme ensevelie pour n'avoir plus vigueur de régner. Et la nouveauté de vie, pour suivre la justice de Dieu, procède de la résurrection.

331 Le ministre : Comment cette grâce nous est-elle appliquée au baptême?

L'enfant: En tant que nous sommes là vêtus de Jésus-Christ, et y recevons son Esprit, moyennant que nous ne nous rendions pas indignes des promesses qui nous y sont données.

De l'usage du baptême

332 Le ministre : De notre côté, quel est le droit usage du baptême?

L'enfant: Il gît en foi et en repentance. C'est que nous soyons certains d'avoir notre
pureté spirituelle en Christ, et sentions en nous et déclarions à nos prochains par oeuvres que l'Esprit d'icelui habite en nous pour mortifier nos propres désirs, afin de nous faire suivre la volonté de Dieu.

Le 50e dimanche

Du baptême des petits enfants

333 Le ministre : Puisque cela y est requis, comment est-ce qu'on baptise les petits enfants?

L'enfant: Il n'est pas dit que la foi et la repentance doivent toujours précéder la réception du sacrement, mais seulement cela doit être en ceux qui en sont capables. Il suffit donc que les petits enfants produisent et démontrent le fruit de leur baptême après être venus en âge de connaissance.

334 Le ministre : Comment montreras-tu qu'il n'y a point d'inconvénient en cela?

L'enfant: Parce que la circoncision était aussi bien sacrement de pénitence, comme Moïse et les prophètes déclarent (Deutéronome 10:16 ; 30:6 ; Jérémie 4:4), et sacrement de foi, comme dit saint Paul (Romains 4:11-12). Et toutefois Dieu n'en a exclu les petits enfants.

Les promesses du peuple d'Israël sont étendues par tout le monde

335 Le ministre : Mais pourras-tu bien montrer qu'il y ait une même raison de les recevoir au baptême comme à la circoncision?

L'enfant: Oui bien. Car les promesses que Dieu avait anciennement faites à son peuple
d'Israël sont maintenant étendues par tout le monde.

336 Le ministre : Mais s'ensuit-il de cela que nous devions user du signe?

L'enfant: Il est ainsi, quand le tout sera bien considéré. Car Jésus-Christ ne nous a pas faits participants de la grâce, qui avait auparavant été au peuple d'Israël, pour l'amoindrir en nous ou la rendre plus obscure qu'elle n'était, mais plutôt l'a éclaircie et augmentée davantage.

337 Le ministre : Entends-tu que si nous ne donnions le baptême aux petits enfants, que la grâce de Dieu serait amoindrie par la venue du Seigneur Jésus?

L'enfant: Oui bien. Car le signe de la bonté et miséricorde de Dieu sur nos enfants qu'ont eu les anciens nous défaudrait, lequel sert grandement à notre consolation et à confirmer la promesse qui a été faite dès le commencement.

338 Le ministre : Tu entends donc, puisque Dieu, se déclarant anciennement être Sauveur des petits enfants, a voulu cette promesse être scellée en leur corps par sacrement extérieur, que c'est bien raison qu'il n'y ait pas moins de confirmation depuis la venue de Christ, vu que la même promesse demeure, et même est plus clairement testifiée de parole et ratifiée de fait.

L'enfant: Oui. Et davantage, puisque c'est chose notoire que la vertu et la substance du
baptême appartient aux petits enfants, on leur ferait injure de leur dénier le signe qui est inférieur.

A quelle condition on baptise les enfants

339 Le ministre : A quelle condition donc devons-nous baptiser les petits enfants?

L'enfant: En signe et témoignage qu'ils sont héritiers de la bénédiction de Dieu,
promise à la génération des fidèles, afin qu'étant venus en âge ils reconnaissent la vérité de leur baptême pour en faire leur profit.

Le 51e dimanche

De la cène

340 Le ministre : Disons de la cène. Et premièrement, quelle est la signification d'icelle?

L'enfant: Notre Seigneur l'a instituée pour nous assurer que par la communication de son corps et son sang nos âmes sont nourries en espérance de la vie éternelle.

Christ par le pain nous représente son corps et par le vin son sang.

341 Le ministre : Pourquoi est-ce que le Seigneur, par le pain, nous représente son corps et par le vin, son sang?

L'enfant: Pour signifier que telle propriété qu'a le pain envers nos corps, c'est de les repaître et sustenter en cette vie mortelle, aussi a son corps envers nos âmes, c'est de les nourrir et vivifier spirituellement. Pareillement, que comme le vin fortifie, réfectionne et réjouit l'homme selon le corps, aussi que son sang est notre joie, notre réfection et vertu spirituelle.

Fiance de notre salut, en quoi gît

342 Le ministre : Entends-tu qu'il nous faille communiquer vraiment au corps et au sang du Seigneur?

L'enfant: Je l'entends ainsi. Car puisque toute la fiance de notre salut gît en l'obéissance qu'il a rendue à Dieu son Père, en tant qu'elle nous est imputée, comme si elle était nôtre, il faut que nous le possédions. Vu que ses biens ne sont pas nôtres, sinon que premièrement il se donne à nous.

343 Le ministre : Mais ne s'est-il pas donné à nous quand il s'est exposé à la mort pour nous réconcilier à Dieu son Père et nous délivrer de damnation?

L'enfant: Si est bien. Mais il ne suffit pas de cela, sinon que nous le recevions, pour
sentir en nous le fruit et l'efficace de sa mort et passion.

Comment nous recevons Jésus-Christ

344 Le ministre : La manière de le recevoir est-ce point par foi?

L'enfant: Oui. Non seulement en croyant qu'il est mort et ressuscité pour nous délivrer de la mort éternelle et nous acquérir la vie, mais aussi qu'il habite en nous et est conjoint avec nous en telle union que le chef avec ses membres, afin de nous faire participants de toutes ses grâces en vertu de cette conjonction.

Le 52e dimanche

345 Le ministre : Cette communion ne se fait-elle sinon en la cène?

L'enfant: Si fait bien. Car nous l'avons par la prédication de l'Évangile, comme dit saint Paul (1 Corinthiens 1:4-9), en tant que le Seigneur Jésus nous y promet que nous sommes os de ses os, chair de sa chair (Éphésiens 5:30), qu'il est le pain de vie qui est descendu du ciel pour nourrir nos âmes (Jean 6:51), que nous sommes un avec lui comme il est un avec son Père (Jean 17:21), et telles choses.

346 Le ministre : Qu'est-ce que nous avons au sacrement davantage, et de quoi nous sertil plus?

L'enfant: C'est que cette communion est plus amplement confirmée en nous, et comme ratifiée. Car combien que Jésus-Christ nous soit vraiment communiqué et par le baptême et par l'Évangile, toutefois ce n'est qu'en partie, non pas pleinement.

Que c'est que nous avons par le signe du pain

347 Le ministre : Qu'est-ce donc en somme que nous avons par le signe du pain?

L'enfant: C'est que le corps du Seigneur Jésus, en tant qu'il a une fois été offert en
sacrifice pour nous réconcilier à Dieu, nous est maintenant donné pour nous
certifier que nous avons part en cette réconciliation.

Que c'est qu'avons par le signe du vin

348 Le ministre : Qu'est-ce que nous avons au signe du vin?

L'enfant: Que le Seigneur Jésus nous donne son sang à boire en tant qu'il l'a une fois épandu pour le prix et satisfaction de nos offenses, afin que nous ne doutions point d'en recevoir le fruit.

Que la cène n'est pas sacrifice

349 Le ministre : Selon tes réponses, la cène nous renvoie à la mort et passion de Jésus- Christ afin que nous communiquions à la vertu d'icelle.

L'enfant: Voire. Car lors le sacrifice unique et perpétuel a été fait pour notre
rédemption, pourquoi il ne reste plus, sinon que nous en ayons la jouissance.

Christ seul sacrificateur éternel

350 Le ministre : La cène donc n'est pas instituée pour faire une oblation du corps de Jésus à Dieu son Père?

L'enfant: Non. Car il n'y a que lui seul à qui appartienne cet office, en tant qu'il est Sacrificateur éternel (Hébreux 5:5). Mais il nous commande seulement de recevoir son corps, et non pas l'offrir (Matthieu 26:26).

Le 53e dimanche

Double signe pour notre infirmité

351 Le ministre : Pourquoi est-ce qu'il y a double signe?

L'enfant: Notre Seigneur l'a fait pour notre infirmité, afin de nous donner à connaître que non seulement il est viande à nos âmes, mais aussi breuvage, afin que nous cherchions en lui notre nourriture pleine et entière, et non ailleurs.

352 Le ministre : Tous doivent-ils user indifféremment de ce second signe, à savoir du calice?

L'enfant: Oui, selon le commandement de Jésus-Christ, contre lequel il n'est licite de rien attenter.

La vérité est avec la figure

353 Le ministre : Avons-nous en la cène simplement le témoignage des choses dessus dites, ou si elles nous y sont vraiment données?

L'enfant: En tant que Jésus-Christ est la vérité, il ne faut douter que les promesses qu'il fait à la cène n'y soient accomplies et que ce qu'il y figure n'y soit vérifié. Ainsi, selon qu'il le promet et représente, je ne doute pas qu'il ne nous fasse participants de sa propre substance pour nous unir avec soi en une vie.

Que nous recevons Jésus-Christ en la cène, et comment

354 Le ministre : Mais comment cela se peut-il faire vu que le corps de Jésus-Christ est au ciel et nous sommes en ce pèlerinage terrien?

L'enfant: C'est par la vertu incompréhensible de son Esprit, laquelle conjoint bien les
choses séparées par distance de lieu.

Que c'est qu'il faut faire pour avoir la vérité du sacrement

355 Le ministre : Tu n'entends pas donc que le corps soit enclos dedans le pain, ni le sang dedans le calice?

L'enfant: Non. Mais au contraire, pour avoir la vérité du sacrement, il nous faut élever nos coeurs en haut au ciel, où est Jésus-Christ en la gloire de son Père, et d'où nous l'attendons en notre rédemption, et non pas le chercher en ces éléments corruptibles.

Arrhes de la résurrection

356 Le ministre : Tu entends donc qu'il y a deux choses en ce sacrement : le pain matériel et le vin que nous voyons à l'oeil, touchons à la main et savourons au goût, et Jésus-Christ, dont nos âmes sont intérieurement nourries.

L'enfant: Voire. Et en telle sorte néanmoins que nous y avons même témoignage, et comme une arrhe, de la résurrection de nos corps, en tant qu'ils sont faits participants du signe de vie.

Le 54e dimanche

357 Le ministre : Quel en doit être l'usage?

L'enfant: Tel que dit saint Paul, c'est que l'homme s'éprouve soi-même devant qu'en approcher (1 Corinthiens 11:28).

358 Le ministre : En quoi se doit-il éprouver?

L'enfant: A savoir, s'il est vrai membre de Jésus-Christ.

Signe si on est membre de Christ

359 Le ministre : Par quels signes le pourra-t-il connaître?

L'enfant: S'il a vraie foi et repentance, et s'il aime ses prochains en vraie charité et n'est point entaché de haine, ni rancune, ni division.

360 Le ministre : Mais est-il requis d'avoir foi et charité parfaite?

L'enfant: Il faut bien que l'une et l'autre soit entière et non feinte. Mais d'avoir une
telle perfection, à laquelle il n'y ait que redire, cela ne se trouvera pas entre les hommes. Aussi la cène serait instituée en vain si nul n'était capable de la recevoir, sinon qu'il fût du tout parfait.

361 Le ministre : L'imperfection donc ne nous empêche point d'en approcher?

L'enfant: Mais au contraire, elle ne nous servirait de rien si nous n'étions imparfaits.
Car c'est une aide et soulagement de notre infirmité.

362 Le ministre : Ces deux sacrements ne servent-ils point à autre fin?

L'enfant: Si font, d'autant que ce sont signes et marques de notre profession. C'est-à dire que par iceux nous protestons que nous sommes du peuple de Dieu et faisons confession de notre chrétienté.

363 Le ministre : Que faudrait-il donc juger d'un homme qui n'en voudrait point user?

L'enfant: Il ne le faudrait tenir pour chrétien. Car en ce faisant, il ne se veut point confesser être tel, et quasi tacitement, il désavoue Jésus-Christ.

364 Le ministre : Mais suffit-il de recevoir une fois l'un et l'autre?

L'enfant: Le baptême n'est ordonné que pour une seule fois, et n'est pas licite de le
réitérer. Mais il n'est pas ainsi de la cène. Pourquoi on reçoit une seule fois le baptême et la cène plusieurs fois

Pourquoi on reçoit une seule fois le baptême et la cène plusieursfois

365 Le ministre : La raison?

L'enfant: Parce que par le baptême, Dieu nous introduit et reçoit en son Église. Après nous avoir reçus, il nous signifie par la cène qu'il nous veut continuellement
nourrir.

Le 55e dimanche

A qui appartient de baptiser et administrer la cène

366 Le ministre : A qui appartient-il tant de baptiser que d'administrer la cène?

L'enfant: A ceux qui ont charge publique en l'Église d'enseigner. Car ce sont choses conjointes que de prêcher la Parole et distribuer les sacrements.

367 Le ministre : N'y en a-t-il pas certaine probation?

L'enfant: Oui bien. Car notre Seigneur donne spécialement la charge à ses apôtres de baptiser, comme de prêcher (Matthieu 28:19). Et touchant la cène, il commande que tous la fassions à son exemple. Or il avait fait office de ministre pour la donner aux autres.

La cène, à qui ne doit être baillée

368 Le ministre : Mais les pasteurs qui sont dispensateurs des sacrements y doivent-ils admettre sans discrétion tous ceux qui s'y présentent?

L'enfant: Touchant du baptême, parce qu'aujourd'hui on ne l'administre qu'à petits enfants, il n'est point métier de discerner. Mais de la cène, il faut bien que le ministre regarde de ne la bailler à un homme qu'on connaît en être du tout indigne.

369 Le ministre : Pourquoi?

L'enfant: Parce que ce serait polluer et déshonorer le sacrement.

Pourquoi Judas a été reçu à la cène

370 Le ministre : Mais notre Seigneur y a bien reçu Judas, quelque méchant qu'il fût.

L'enfant: Son iniquité était encore cachée, et combien que notre Seigneur la connût, si n'était-elle pas notoire à tous.

371 Le ministre : Que sera-ce donc des hypocrites?

L'enfant: Le ministre ne les peut exclure comme indignes, mais doit attendre que le
Seigneur ait révélé leur méchanceté.

372 Le ministre : Et s'il en connaît quelques-uns indignes, ou qu'il en soit averti?

L'enfant: Cela ne suffit point pour les exclure, sinon qu'il y ait approbation suffisante
et jugement de l'Église.

373 Le ministre : Il faut donc qu'il y ait quelque ordre et police sur cela?

L'enfant: Voire, si l'Église est bien réglée. C'est qu'on députe personnages pour veiller sur les scandales qui pourraient être. Et qu'iceux, en l'autorité de l'Église, interdisent la communion à ceux qui n'en sont nullement capables, et auxquels on ne la peut donner sans déshonorer Dieu et scandaliser les fidèles.

Fin du catéchisme de Genève (de Jean Calvin).
Ed. Labor et Fides. 1986.

Catéchisme de Genève par Jean Calvin:  Part 1 - Part 2 - Part 3

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